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St. John Lucas, comp. (1879–1934). The Oxford Book of French Verse. 1920.

Mathurin Régnier 1573–†1613

129. Stances

SI vostre œil tout ardent d’amour et de lumière

De mon cœur vostre esclave est la flamme première

Que comme un astre saint je révère à genoux,

Pourquoy ne m’aymez-vovs?

Si vous que la beauté rend ores si superbe

Devez, comme une fleur qui flétrit dessus l’herbe,

Éprouver des saisons l’outrage et le courroux,

Pourquoy ne m’aymez-vous?

Voulez-vous que votre œil en amour si fertile

Vous soit de la nature un présent inutile?

Si l’Amour comme un dieu se communique à tous,

Pourquoy ne m’aymez-vous?

Attendez-vous qu’un jour un regret vous saisisse?

C’est à trop d’intérêts imprimer un supplice.

Mais puisque nous vivons en un âge si doux,

Pourquoy ne m’aymez-vous?

Si vostre grand beauté toutes beautés excelle,

Le ciel pour mon malheur ne vous fît point si belle:

S’il semble en son dessein avoir pitié de nous,

Pourquoy ne m’aymez-vous?

Si j’ay, pour vous aymer, ma raison offensée,

Mortellement blessé d’une flèche insensée,

Sage en ce seul égard que j’en benys les coups,

Pourquoy ne m’aymez-vous?

La douleur, m’étrangeant de toute compagnie,

De mes jours malheureux a la clarté bannie;

Et si dans ce malheur pour vous je me résous,

Pourquoy ne m’aymez-vous?

Fasse le ciel qu’enfin vous puissiez recognoître

Que mon mal a de vous son essence et son être.

Mais, Dieu! puisqu’il est vray, yeux qui m’êtes si doux,

Pourquoy ne m’aymez-vous?