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St. John Lucas, comp. (1879–1934). The Oxford Book of French Verse. 1920.

François-Marie Arouet de Voltaire 1694–†1778

192. A Horace

J’AI déjà passé l’âge où ton grand protecteur,

Ayant joué son rôle en excellent acteur,

Et sentant que la Mort assiégeait sa vieillesse,

Voulut qu’on l’applaudît lorsqu’il finit sa pièce.

J’ai vécu plus que toi; mes vers dureront moins;

Mais au bord du tombeau je mettrai tous mes soins

A suivre les leçons de ta philosophie,

A mépriser la mort en savourant la vie,

A lire tes écrits pleins de grâce et de sens,

Comme on boit d’un vin vieux qui rajeunit les sens.

Avec toi l’on apprend à souffrir l’indigence,

A jouir sagement d’une honnête opulence,

A vivre avec soi-même, à servir ses amis,

A se moquer un peu de ses sots ennemis,

A sortir d’une vie ou triste ou fortunée

En rendant grâce aux dieux de nous l’avoir donnée.

Aussi, lorsque mon pouls inégal et pressé

Faisait peur à Tronchin, près de mon lit placé,

Quand la vieille Atropos, aux humains si sévère,

Approchait ses ciseaux de ma trame légère,

Il a vu de quel air je prenais mon congé;

Il sait si mon esprit, mon cœur, était changé.